Vous nous inviterez sans doute Monsieur le Président comme vous l’avez déjà fait, à ne pas trop nous focaliser sur la situation nationale pour nous attacher à la seule situation girondine. Mais nos débats budgétaires ne peuvent pas être auto -centrés sur la seule Gironde. Nos débats budgétaires ne peuvent pas ressembler à une monographie dans laquelle la Gironde serait déconnectée de son environnement. La Gironde est en prise avec son écosystème nationale et européen. Dans ce contexte général, nous sentons bien que l’Etat a de plus en plus de difficulté à juguler ses déficits publics. Nous voyons bien que l’Etat a fait le choix de mettre une forte pression sur les collectivités locales.

A cet égard, notre Conseil départemental, comme l’ensemble des collectivités territoriales est appelé par le gouvernement à « concourir au redressement des finances publiques ». Nous ne contestons pas la nécessité de contribuer à la baisse des déficits. Même en cas d’alternance, il est probable que ces efforts se poursuivraient. Cependant l’ampleur de cette baisse, con caractère mécanique et le rythme brutal imposé par le gouvernement met gravement en péril la situation économique d’un certain nombre de collectivités locales et notamment les communes. La baisse des dotations de l’Etat aux collectivités territoriales s’élève à 50 milliards d’€ d’économies dégagées sur 3 ans : les collectivités en supporteront 11 milliards, soit 3,67 milliards d’€ en 2015. Pour le Conseil départemental de la Gironde, la baisse de dotations de l’Etat se traduira par une baisse de 85 millions d’€ de dotations. De nombreux élus se mobilisent sur cette question, au-delà des clivages politiques. Une première manifestation se tenait à l’initiative de l’AMF le mercredi 17 juin dernier. Une grande journée de manifestation aura lieu le 19 septembre prochain à Paris. De nombreux élus présents dans notre assemblée y participeront. Le Gironde doit prendre sa part dans cette mobilisation. C’est pourquoi le groupe Gironde Avenir a proposé une motion commune. A l’instar de nombreuses motions votées par d’autres conseils départementaux (Lot et Garonne, Soane et Loire…). Une motion rédigée sur la base consensuelle de la motion votée par les conseils municipaux pour alerter les pouvoirs publics et le gouvernement sur l’impact de ces mesures gouvernementales pour les territoires, les habitants et les entreprises de Gironde…

« Quels que soient les efforts entrepris pour rationaliser, mutualiser et moderniser l’action publique locale, les départements ne pourront pas absorber une contraction aussi violente de leurs ressources (…) La seule alternative serait alors de procéder à des arbitrages douloureux affectant les services publics locaux et l’investissement du fait des contraintes qui limitent leurs leviers d’action »

Les résultats de cette politique sont bien visibles pour notre département. Ils se traduisent concrètement dans notre budget. Les recettes départementales sont marquées par une forte volatilité et des contractions, alors que les dépenses contraintes à la charge du département sont en augmentation en raison notamment du volume que représente le RSA en pleine explosion.

Augmentation des dépenses d’action sociale et impact de plus en plus préoccupant du RSA

  • Pour le RSA , vous évoquez un décaissement moyen mensuel de 18 M€, d’où un besoin annuel qui tourne autour de 2015 M€ cad + 8% par rapport au CA 2014 donc inscription au BS : +5,5 M€.

Nous voyons bien l’impérieuse nécessité, au niveau national, de réformer en profondeur le système de financement de ces dépenses sociales (l’un des 4 chantiers prioritaires définis par Dominique Bussereau lors de son élection à l’ADF). Pour l’Observatoire national de l’action sociale (ODAS) qui présentait le 10 juin dernier son enquête annuelle, le système actuel de financement n’est plus tenable pour les départements. Le RSA continue de progresser et la part prise en charge par l’Etat continue de diminuer. La baisse du taux de prise en charge par l’Etat est flagrante : la part de l’allocation financée par l’Etat est aujourd’hui de 66%. On le constate, l’allocation n’est aujourd’hui compensée qu’aux deux tiers. Sans une évolution rapide du mode de financement de ces dépenses sociales, nous serons soumis à la rigueur implacable de l’effet ciseau.

Le groupe Gironde Avenir a souvent relevé dans cet hémicycle, des transferts de compétences mal financés ou insuffisamment compensés au niveau de ces dépenses sociales (pour rappel : 2001 : création de l’APA, transfert du RMI en 2004, PCH en 2005, remplacement du RMI par le RSA en 2009) et demander à ce qu’on applique le principe selon lequel « qui décide, paie ». Par le passé, nous avions obtenu la création au sein de notre institution d’un observatoire des transferts des compétences et des charges. Celui –ci ne s’est pas réuni depuis trop longtemps. Dans les circonstances actuelles, je vous propose que nous réactivions cette instance. Vous nous direz si vous être favorable à cette proposition.

J’ajoute que lors de notre dernière réunion plénière, vous m’aviez invité à prendre contact avec l’Association des départements de France pour évoquer le sujet des baisses de dotations, plus que préoccupants pour l’équilibre financier de notre institution. J’ai donc saisi Dominique Bussereau par courrier et lui ai également demandé une audience par téléphone. Je sais que lors de sa conférence de presse, le nouveau président de l’ADF s’est saisi de ces sujets et en a fait les chantiers prioritaires de sa future mandature. Je crois savoir également que le Président vous a confié des missions au sein de l’association qui vous permettrons de peser de tout votre poids sur ces sujets et de défendre au mieux les intérêts de la Gironde.

L’ensemble des éléments que je viens d’évoquer fragilise bien évidemment notre budget départemental. Il relève de votre responsabilité d’exécutif d’y apporter des réponses. Attendre du gouvernement qu’il règle rapidement les problèmes financiers des départements nous parait illusoire.

La finalité du budget supplémentaire consiste à actualiser ou corriger les estimations de dépenses et de recettes du budget primitif. CA 2014 : excédent global de 10, 1 M€ (déficit d’investissement de 24,7 M€ et excédent de fonctionnement de 34,8 M€) – Bilan des crédits reportés au BS laisse apparaitre un besoin de financement de 8M€ couvert en partie par l’excédent (10,1 M€) donc disponible de 2,1 M€ (10,4M€ en 2014).

En matière de recettes,

Certains ajustements à la hausse (donc sous-évaluées au BP) :

  • CVAE : + 4, 6M€ (CA 2014 : 161, 7M€ / BP2015 : 163,3M€ / BS : 167,9M€)
  • DCRTP (Dotation de compensation de la Réforme de la Taxe Professionnelle) : +0,9 M€
  • IFER (Imposition Forfaitaire sur les entreprises de réseau) : +0,2 M€
  • DGF : +1M€ pour atteindre pour 2015 175,4M€ (baisse de la dotation par rapport à 2014 : -25,6 M€)
  • DMTO : +10,2 M€ (prévisions 2015 : 257 M€ cad +12 % par rapport au CA 2014)

D’autres recettes sont revues à la baisse (car surévaluées au BP) :

  • Compensations fiscales : -1,2 M€
  • Fiscalité transférée : -7, 4M€ dont la principale diminution concerne la TSCA (taxe spéciale sur les conventions d’assurances) à hauteur de 6,6M€ (CA 2014 : 127,8M€ / BP 2015 139,1M€).
  • Taxe foncière sur les propriétés bâties : – 4,1M€ (En commission des finances : rythme de saisie des écritures ? Effet retard ? (CA 2014 : 270 M€ / BP 293 M€).

Les recettes de fonctionnement progressent de 14 M€ entre le budget supplémentaire et le budget primitif.

En matière de dépenses de fonctionnement,

Ajustements à la hausse :

  • RSA : constat d’un décaissement moyen mensuel de 18 M€ d’où un besoin annuel qui tourne autour de 2015 M€ cad + 8% par rapport au CA 2014 donc inscription au BS : +5,5 M€.
  • Frais d’hébergement relatifs à l’enfance : +0,9 M€
  • PCH : +0,9 M€
  • Ressources humaines : +0,3 M€

A la baisse :

  • APA : – 1,2 M€
  • Contribution au Fonds de péréquation de la CVAE : -2,8 M€
  • Frais financiers : -0,6M€
  • Frais généraux : – 2,8 M€ (dragage des ports pour 0,2 M€ ou frais de communication : -0,15 M€)
  • Autres honoraires et conseils : -1,1M€ sur un budget de 5M€ : poser la question en commission des finances sur cette baisse conséquente.

Quelle explication ? Idem pour études et recherches : -496 811 sur un budget de 2,1 M€ + autres frais divers : -346 100 sur un budget de 2,3M€.

Il existe toujours un doute sur le gonflement artificiel de ces lignes budgétaires générales au BP qui permettent de justifier une augmentation des taux et qui baissent ensuite au cours de l’exercice !
Dépenses nouvelles du BS : 13, 2 M€.

Plus largement, l’ensemble des dépenses de fonctionnement reste à un niveau élevé. On note toutefois qu’un effort est réalisé dans la régulation des dépenses, mais il n’est pas à la hauteur des besoins. Nous pensons et nous nous sommes déjà exprimés sur le sujet que seule une action résolue de maîtrise des dépenses de fonctionnement par l’adoption de mesures structurantes et la priorisation des investissements permettra d’y arriver. Il existe pourtant selon nous, des marges de manœuvre notamment en modernisant nos méthodes d’achat, en repensant l’organisation de nos services publics, en ouvrant les chantiers de la mutualisation et de la contractualisation.

En matière d’investissement,

Autofinancement : + 0,8M€

Recettes d’investissement : 1,42M€

Excédent disponible après report : 2,1M€

Investissements sur le patrimoine départemental (Maison de la Promotion Sociale, Immeuble Gironde, MDSI Ambarès (0,5M€)). Autorisations de programme nouvelles à hauteur de 10,2M€ (restauration du Phare de Cordouan, aides à la pierre, infrastructures routières, ENS.

– Les collectivités locales sont souvent les seuls promoteurs de l’investissement public face à l’Etat démissionnaire. Compenser cette baisse des dotations par une diminution de l’investissement serait suicidaire… Ce serait faire supporter d’une autre manière aux Girondins, aux entreprises, à l’économie, à l’emploi, la baisse des dotations de l’Etat

– Financement des investissements (plutôt qu’affectation à la réduction du programme d’emprunt : nous sommes favorables à cela. Nous connaissons les conséquences positives de cette politique d’investissement sur l’économie locale.

– Les choix des investissements prévus appartiennent à la majorité et peuvent être discutés (peut-être qu’Hubert Laporte pourrait poser des questions sur les 0,5 M€ prévus pour la MDSI d’Ambarès car lors de notre rencontre avec lui, il nous a dit que c’était un sujet sensible / par ailleurs, un élu du Bassin pourrait poser la question de la baisse des 0,2 M€ sur le dragage des ports alors que lors de notre rencontre avec Madame Maupilé et Monsieur Eroles (tous les deux absents pour le BS), ils nous avaient alerté sur l’urgence du dragage du port de La Teste.)

Ces choix vous appartiennent.

Par ailleurs et nous avons déjà exposé notre position en mars dernier sur ce sujet : le recours au levier la fiscalité n’est pas acceptable pour nous. Ce n’est pas aux Girondins de compenser les baisses de recettes fiscales.

Dans la lignée du vote de notre groupe au Budget Primitif et lors du vote de la fiscalité, nous voterons contre ce budget supplémentaire.

Jacques BREILLAT
Conseiller départemental du canton des Coteaux de Dordogne,
Président du Groupe Gironde Avenir