Intervention de Monsieur Jean-Pierre Baillé sur le Budget Supplémentaire 2014

Jean-Pierre BailléMonsieur le Président,
Mes chers collègues,

Yves d’Amécourt, notre Président de groupe, ne peut pas siéger aujourd’hui pour des raisons personnelles et me prie de l’en excuser.

Il m’a demandé d’intervenir au nom du groupe Gironde Avenir sur le vote de ce Budget Supplémentaire.

Traditionnellement, le budget supplémentaire sert à réaliser quelques ajustements et à donner plus de précisions sur certaines dépenses ou certaines recettes. Il n’a pas pour vocation de changer la stratégie financière impulsée lors du Budget Primitif. Cela se vérifie encore cette année avec une évolution du volume du budget de moins de 5% par rapport au BP 2014.

Que constatons-nous ?

D’une part, je voudrais revenir sur ce que j’appellerais les handicaps de ce budget autant en termes de dépenses de fonctionnement que de recettes.

Des dépenses de fonctionnement en hausse de 2,28% par rapport au BP et de 4,84 % par rapport au Compte Administratif notamment sous l’effet des dépenses sociales contraintes qui continuent d’augmenter.

Ainsi, concernant le RMI-RSA : les dépenses sont en hausse de 5M€ avec un besoin annuel évalué à 195/196 M€. La situation économique catastrophique du pays et notamment l’explosion des chiffres du chômage expliquent cette augmentation tant il est vrai que les radiations du Pôle Emploi continuent à être importantes et font basculer les demandeurs d’emploi dans les dispositifs d’insertion et notamment le RSA.

Le volume des dépenses nouvelles attachées à ce BS est évalué à 20,8M€. Par ailleurs, certaines recettes accusent une baisse.

Je ne reviendrai pas sur la baisse historique des dotations de l’Etat mais la baisse de la fiscalité directe et notamment de la CVAE (-7,6%). Cependant, cette baisse est malheureusement le corollaire du marasme dont tous les indicateurs économiques témoignent : décélération de la consommation des ménages, chute de la production, baisse des exportations et recul du PIB… Le PIB n’est autre que l’addition des « Valeur Ajoutée » des entreprises… Sans croissance, pas de chance de voir augmenter la CVAE.

Un certain nombre de points positifs sont cependant à noter :

La capacité d’autofinancement est maintenue voire renforcée (3,9M€) puisque les propositions de recettes nouvelles de fonctionnement (24,7M€) étant supérieures aux dépenses nouvelles (20,8M€).

La rétrocession par l’Etat des frais de gestion sur le foncier bâti rapporte 16,5M€ au lieu des 5M€ prévus au BP (donc +11,5M€).

Vous attribuez ces recettes nouvelles à la détente des relations avec l’Etat !

N’oublions pas cependant qu’elles ont pour objectif de répondre à la compensation défaillante de l’Etat en matière de dépenses sociales mais la principale solution apportée est une sur-taxation des contribuables girondins pendant 2 ans (hausse du taux des droits de mutation que nous dénoncions déjà lors de la séance exceptionnelle de janvier dernier). Cette réponse ne peut donc pas être satisfaisante et pérenne !

Concernant les dépenses à caractère général et les dépenses de personnel, ce budget supplémentaire s’inscrit dans une volonté de maîtriser les coûts. Il faudra cependant que cela se confirme lors du CA 2014.

Concernant les investissements, la part de l’excédent disponible après financement des reports est de 10,41 M€. La part des recettes disponible après financement des dépenses de fonctionnement est de 3,89 M€, les recettes d’investissement sont de 1,33 M€. Cela permet un financement des investissements à hauteur de 15,63 M€.

Vous avez fait le choix d’investir plutôt que de les affecter à la réduction du programme d’emprunts comme vous l’aviez fait en 2013 et nous saluons cette initiative.

Vous orientez ces investissements sur le patrimoine de la collectivité (par exemple les collèges (+4,7M€), les infrastructures routières (0,9M€) à hauteur de 10 M€) et des subventions d’équipement : subventions aux communes (3,4M€) notamment pour les travaux d’assainissement et d’eau potable, soutien au développement économique, aide à la pierre. Nous connaissons bien les conséquences positives de cette politique sur l’économie locale.

Des choix d’investissement qui vous appartiennent. D’autres auraient été possibles…

A ce stade de l’analyse, on serait presque tenté de voter le budget !

Pourtant, notre groupe ne le fera pas et s’abstiendra.

Pourquoi ?

Ce budget supplémentaire s’inscrit dans une certaine continuité avec le Budget Primitif et ne le modifie qu’à la marge.

Il confirme que la situation financière de notre collectivité reste bonne et des marges de manœuvres politiques existent toujours.

Malgré un contexte économique très dégradé dont nous avons relevé les indicateurs plus haut (CVAE et RSA notamment), notre collectivité fait face.

Cependant nous avons toujours un profond désaccord sur la hausse de la fiscalité.

En effet, comme c’est le cas depuis maintenant plusieurs années, la situation financière de notre collectivité montre qu’en juin, la situation est toujours plus optimiste en terme de recettes qu’en décembre. Une pause fiscale était bel et bien possible en avril mais la tentation a été trop forte d’augmenter encore et toujours les impôts des Girondins… On ne pouvait pas faire autrement… l’augmentation était prévue de longue date.

Pourtant, l’augmentation du taux de 1% et le déplafonnement du taux des droits de mutation (de 3,8% à 4,5%) représentent pour 2014 une importante pression fiscale pour les Girondins dans le contexte économique que connaissent les ménages aujourd’hui.

En décembre dernier, nous avions décidé de ne pas participer au vote du budget primitif pour les raisons que je ne rappelle pas dans le détail ici.

Une des raisons touchait à la manière dont nous avons été et dont nous sommes associés aux décisions qui nous touchent au premier plan à savoir la réforme territoriale.

Et cela continue…

La réforme des collectivités territoriales en cours en est la parfaite illustration. Elle a été proposée dans la précipitation, unilatéralement, sans concertation.

Alors que les élections départementales sont maintenant fixées fin 2015, le gouvernement veut absolument faire approuver sa réforme avant la fin de l’année. Or, touchant à l’équilibre institutionnel, aux pouvoirs locaux, aux services publics, un tel bouleversement aurait exigé un peu plus de temps de concertation et de préparation.

Les élus locaux n’ont une fois de plus pas été associés et ont été mis devant le fait accompli. Nous avons le sentiment que ces réformes sont pilotées par des technocrates et qu’elles échappent à l’inspiration de ces mêmes élus !

Par ailleurs, des nombreuses zones d’ombre persistent et notamment sur la répartition des compétences et des compensations financières qui doivent en découler.

Enfin, une telle réforme ne devrait se faire sans en parallèle et en profondeur, une réforme des finances locales et de la fiscalité locale.

Economies budgétaires, simplification administrative, meilleure efficacité de l’action locale, meilleure répartition des compétences, plus grande proximité avec les citoyens, dynamisation et ouverture des territoires : tels sont les véritables enjeux pour une réforme territoriale porteuse de vrais changements.

Le message délivré par nos concitoyens lors des dernières élections est clair : « la politique » (telle que nous la donnons en spectacle) on en a marre !

Au quotidien sur le terrain, nous sommes capables de dépasser nos clivages dans les communes, les syndicats et les communautés de communes. Tous les maires, les adjoints et conseillers municipaux de cet hémicycle peuvent en témoigner.

Mais ici, dans cette enceinte, nous en sommes incapables !

En septembre prochain, à l’issu d’un séminaire et d’un travail collectif que nous sommes en train d’organiser avec Yves d’Amécourt, le groupe GIRONDE AVENIR fera des propositions sur les transferts de compétences, sur la réforme territoriale, sur l’avenir du département, sur les économies possibles et impossibles.

Mais je vais vous faire une proposition : Pourquoi n’est-ce pas le Conseil Général qui organiserait cette concertation en partenariat avec la Région et l’Association des Maires de la Gironde et à laquelle seraient associés les élus locaux hors clivage politique ? Pourquoi ne serions-nous pas capables de travailler ensemble sur ce projet de réforme territoriale ? Pourquoi ici la concertation est-elle réservée à son seul camp politique ?

Je ne parle pas du vote de la motion que vous avez prévu de nous proposer tout à l’heure pour laquelle, en fonction de ce que je viens de dire, chacun se positionnera librement.

Monsieur le Président, Mes chers collègues,

La succession des monologues ne fait pas un dialogue… L’addition des motions ne fait pas une proposition ! »

Je vous parle d’un vrai travail en commun qui serait un signe fort envoyé à nos concitoyens.

Je vous remercie.